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Actualités & Reportages
-
A-t-on encore le droit de changer d'avis ?
Blandine Rinkel
- La Martiniere Jeunesse
- Alt
- 13 Janvier 2023
- 9791040113034
Avoir une opinion définitive, choisir son camp et réprouver l'autre... Nous sommes sans arrêt incités à prendre parti. Et ce, sans retour possible. Pourtant, comment savoir avec certitude quel métier nous exercerons dans 10 ans ? Quel style de musique nous définit le mieux ?
Dans ce texte intime, à la fois ode aux convictions et à l'incertitude, Blandine Rinkel prend le contrepied des injonctions actuelles, et rappelle notre droit à changer. Parce que s'autoriser à changer, c'est préférer le dialogue à l'entente forcée, et le conflit à l'indifférence. C'est accepter que l'on puisse se tromper sans se trahir, être contradictoire et pluriel. C'est créer de l'inattendu. Bref, s'autoriser à changer, c'est gagner en liberté. -
Les sécheresses estivales et hivernales que connaît la France mettent de nombreuses régions sous tension hydrique. Loin d'être exceptionnelle, cette situation va devenir notre quotidien. Face au risque d'une crise de l'eau, ressource naturelle la plus menacée par le dérèglement climatique, le « plan eau » du gouvernement propose des ajustements techniques tournés vers le court-terme et quelques intérêts privés. Il y a pourtant urgence à réinterroger les usages de l'eau, son partage et sa gestion, et à déployer une nouvelle politique - déjà à l'oeuvre sur de nombreux territoires urbains et ruraux - essentielle à la garantie d'une Terre habitable.
-
"Les gens sont hallucinants, quand même ! ils veulent des forêts, des oiseaux et des rivières, ils veulent du temps libre, des fleurs pour le docteur et des repas de famille. Alors qu'ils pourraient dégager des profits ! Envoyez la Brav-M sur ces imbéciles !".
Deux écrivaines, sept dessinatrices ou dessinateurs racontent avec leurs mots ou dessins ce qu'ils ont vu et comment ils ont interprété les manifestations contre la réforme des retraites, ou celle de Sainte-Soline, ainsi que les réactions du pouvoir. -
D'images et d'eau fraîche : trouvailles, trésors et talismans, ce que nos collections disent de nous
Mona Chollet
- Flammarion
- Essais Flammarion
- 19 Octobre 2022
- 9782080285065
Jusqu'ici, j'ai toujours écrit pour tenter de débrouiller un ou plusieurs problèmes auxquels je me heurtais dans ma vie, en espérant que ce travail serve aussi à d'autres. Il est un peu déconcertant de le faire simplement, cette fois, pour partager l'un des stratagèmes par lesquels je maintiens allumée la flamme de ma vitalité - pour parler de plaisir.Parmi tous les ouvrages qui paraissent sur la culture numérique, je n'ai encore jamais rien lu au sujet de cette communauté éparse que j'ai moi-même rejointe il y a bientôt dix ans : celle des collectionneurs d'images en ligne, qui accumulent et partagent au fil des jours, sur Instagram, Tumblr, Flickr ou Pinterest, des photographies d'art, des tableaux, des dessins qu'ils aiment.Cette activité en apparence anodine représente mon équivalent de la liste des «Choses qui font battre le coeur» dressée par Sei Shônagon, dame de compagnie de l'impératrice consort du Japon, dans ses Notes de chevet, au XI? siècle. Dans un monde de plus en plus désespérant, j'ai envie de revendiquer ce rapport primaire et entêté à la beauté, cette confiance dans l'appui qu'elle offre, faisant de nous des perchistes arrachés momentanément à la gravité et catapultés dans les airs, libres et légers, avant de retomber... ailleurs.
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Nous vivons désormais dans une vallée oubliée, mi-française mi-italienne, une vallée à l'entre-deux, à l'entre-droit et devoir, où la compassion devient répressible, où le droit s'oppose à une morale, où la morale s'impose au pouvoir. Mais où nous avons créé une utopie capable de résister.
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Par-delà l'androcène
Adélaïde Bon, Sandrin Roudaut, Sandrine Rousseau
- Seuil
- Libelle
- 26 Août 2022
- 9782021513165
Androcène, l'ère de l'homme. Enfin, de certains. L'ère au cours de laquelle une poignée d'oppresseurs, différents selon les lieux ou les époques, ont exploité et asservi la multitude pour leurs intérêts propres. Une ère dont nous pourrions sonner la fin, dans nos intérêts communs.
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Je dédie cet abécédaire des concepts des cultures éloignées à la mémoire de Marcel Mauss. Pour moi, ce sont autant d'éléments du gigantesque puzzle que pourrait être un répertoire de l'humanité.Marcel Mauss a su, comme nul autre, distinguer dans les mondes éloignés les concepts spécifiques à une culture, celle-ci et pas une autre, leur restituer leur signification et leur usage. Il l'a si bien fait que certains sont entrés dans notre langue, comme le tabou ou le mana, tous deux originaires de Polynésie. Je me suis nourri de son érudition, de son intelligence, tout entière vouée à la compréhension des autres.J'ai tenté à mon tour d'attraper dans des mondes éloignés des concepts qui me paraissaient à la fois spécifiques et féconds. Je me suis donc longuement appesanti sur le djinn du Maghreb ou du Moyen-Orient, sur le zar d'Éthiopie ou du Soudan, ou sur le vaudou du Bénin et du Togo, parce que j'avais besoin de ces notions pour rendre plus cohérent mon travail clinique auprès de patients provenant de ces mondes.T. N.
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Les répercussions mondiales de la mort de George Floyd le 25 mai 2020 l'ont montré : plus que jamais il est utile de défendre un usage critique du mot race, celui qui permet de désigner et par là de déjouer les actualisations contemporaines de l'assignation raciale.
User de manière critique de la notion de race, c'est décider de regarder au-delà de l'expression manifeste et facilement décelable du racisme assumé. C'est saisir la forme sédimentée, ordinaire et banalisée de l'assignation raciale et la désigner comme telle, quand elle s'exprime dans une blague ou un compliment, dans une manière de se croire attentif ou au contraire de laisser glisser le lapsus, dans le regard que l'on porte ou la compétence particulière que l'on attribue. C'est ainsi expliciter et problématiser la manière dont selon les époques et les contextes, une société construit du racial.
Si le mot a changé d'usage et de camp, il demeure cependant tributaire de son histoire et y recourir de manière critique fait facilement l'objet d'un retournement de discrédit. Celles et ceux qui dénoncent les logiques de racialisation sont traité·es de racistes. Celles et ceux qui mettent en lumière l'expérience minoritaire en la rapportant à celle des discriminations raciales sont accusé·es d'avoir des vues hégémoniques. Dans le même temps, les discours racialisants continuent de prospérer sous le regard indifférent de la majorité.
Si le mot de race sert à révéler, y recourir est donc d'autant plus nécessaire dans le contexte français d'une République qui pense avoir réalisé son exigence d'indifférence à la race et y être parfaitement " aveugle ", " colour-blind ", dirait-on en anglais. -
L'appel à la vigilance : face à l'extrême droite
Edwy Plenel
- La Decouverte
- Les Petits Cahiers Libres
- 9 Mars 2023
- 9782348078835
Le 13 juillet 1993, un " Appel à la vigilance ", signé par quarante ?gures de la vie intellectuelle française et européenne, alertait sur la banalisation des discours d'extrême droite dans l'espace éditorial et médiatique. Ses signataires rappelaient que ces discours " ne sont pas simplement des idées parmi d'autres, mais des incitations à l'exclusion, à la violence, au crime " et que, pour cette raison, " ils menacent tout à la fois la démocratie et les vies humaines ". En conséquence, ils proclamaient s'engager " à refuser toute collaboration à des revues, des ouvrages collectifs, des émissions de radio et de télévision, des colloques dirigés ou organisés par des personnes dont les liens avec l'extrême droite seraient attestés ".
Trente ans ont passé, et c'est peu dire que cette alerte n'a pas été entendue, notamment en France. Avec le recul, cet " Appel à la vigilance " prend la stature d'une prophétie ayant tôt cherché à conjurer ce qu'il nous faut aujourd'hui combattre : l'installation à demeure dans l'espace public des idéologies xénophobes, racistes, identitaires, rendant acceptables et fréquentables les forces politiques qui promeuvent l'inégalité des droits, la hiérarchie des humanités, la discrimination des altérités. Quand avons-nous baissé la garde ? Quelle est la responsabilité des journalistes et des intellectuels dans cette débâcle ? Comment, au nom de la liberté de dire, de tout dire, y compris le pire et l'abject, la scène médiatique est-elle devenue le terrain de jeu d'idées et d'opinions piétinant les principes démocratiques fondamentaux ? -
Alors que le mot " utopie " est au mieux paré des vertus du doux rêve, au pire rangé pour certains non loin des totalitarismes, l'historien Thomas Bouchet s'en empare, dans un voyage au sein de la littérature et de la théorie politique, afin de le recharger.
" Les six lettres d'utopie nous sont assez familières. Pourtant, il est difficile de déterminer quelle place le mot tient dans nos vies. Il paraît à la fois proche et lointain. Il est déroutant en lui-même car si en grec " topos " signifie " lieu ", le " u " initial peut être l'équivalent d'un " ou " et l'utopie serait alors le non-lieu (le lieu de nulle part), ou bien l'équivalent d'un " eu " et l'utopie serait alors le bon lieu (le lieu du bonheur). Il déroute aussi parce qu'il est environné d'une petite nébuleuse de mots dérivés, de qualificatifs, d'expressions apparentées. Utopie, mais aussi utopiste ou utopique. Utopie, pure utopie, belle utopie, folle utopie. Ceci est une utopie, cela n'est pas une utopie ou n'est qu'une utopie. Il y a aussi anti-utopie ou contre-utopie (mais quel lien entre ces deux-là ?), qui peuvent aussi accompagner utopie, ou s'y confronter, ou s'y substituer. Accommodée à toutes les sauces, l'utopie a été parée dans l'histoire de couleurs diverses voire inconciliables. Cela reste le cas aujourd'hui - on peut s'en convaincre en faisant le test auprès de proches ou de passants. Orange sur le mur de la Croix-Rousse, mais aussi rose ou rouge ou brune ou noire, verte comme l'écologie, jaune comme l'opposition populaire au président Macron et à son gouvernement. Ou arc-en-ciel. Certains la voient transparente, d'autres opaque. Ici claire, sombre là.Elle peut être désirée ou bien dénigrée, prisée ou bien méprisée. Elle peut s'employer avec le U majuscule de l'admiration ou de la peur, ou avec un u minuscule motivé par la confiance, l'attendrissement, la moquerie. Elle donne lieu à toutes sortes de parallèles, rapprochements, télescopages, mises à distance : avec idéologie (Karl Mannheim, Paul Ricoeur), rêve, mythe, réalité, fiction et aussi science-fiction, et même totalitarisme. Car utopie est aussi - et peut-être même surtout - ce qu'en font celles et ceux qui s'en saisissent. Ce mot-caméléon prend les teintes de ce qui l'entoure. " Vive l'utopie " pour les un·es, " à bas l'utopie " pour les autres : le mot est davantage polémique que descriptif et l'effet de brouillage n'en est que plus marqué. En bref : utopie est un mot vif et vivant, un mot qui ne tient pas en place et qui pour cette raison même nous est précieux. " Thomas Bouchet. -
(Ré)apprendre à respirer
Stéphanie Brillant, Gomargu
- Actes Sud
- Je Passe A L'acte
- 15 Février 2023
- 9782330172817
Nous savons tous respirer pour survivre, mais ce geste automatique, lorsqu'il est mal exécuté à répétition, peut s'avérer une prison pour le corps et l'esprit. Car la respiration est l'une des clés de l'autorégulation du corps : à rythme inadapté, elle sursollicite notre système nerveux et maintient le corps dans un état de tension permanente. Après le succès de son essai L'Incroyable pouvoir du souffle et la création de l'Académie du souffle, Stéphanie Brillant réunit ici l'essentiel de ses recherches sur les facultés salvatrices de la respiration. Enrichi de conseils et d'exercices pratiques pour réapprendre à respirer, ce guide montre que le souffle est un véritable super-pouvoir pour réguler la chimie du corps et (re)trouver le bien-être.
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Les chiffres, omniprésents, posés comme donnés, semblent imposer une vérité laquelle nous devrions nous soumettre. Or il est temps de (re)trouver une capacité de les discuter, d'en déchiffrer les significations. Il est temps de se ressaisir de ces objets sociaux, pour retrouver une capacité d'en débattre, un droit de les critiquer et une liberté de les redéfinir.
Chiffres de contamination, mesure de l'intelligence, nombre de chômeurs, score de popularité, montant de la dette publique, indicateurs de performance... Si les chiffres sont omniprésents dans nos sociétés, que nous disent-ils réellement ? De quoi parlent-ils exactement ? Davantage qu'une vérité sur le monde, ils révèlent nos besoins de nous coordonner, de trouver des manières de faire des choix et de disposer de conventions pour nous entendre. Ils nous parlent d'une multitude de choses qu'ils contribuent en permanence à créer. Fruits de l'activité humaine, ils expriment et matérialisent nos choix, nos valeurs, nos conventions : les chiffres sont des objets sociaux et humains, et non des données naturelles s'imposant à nous. Tout l'objet de cet ouvrage est ainsi de prendre la mesure des dimensions conventionnelles, sociales et politiques des chiffres, en identifiant les enjeux de pouvoirs auxquels ils sont associés. Ce déchiffrage permet de reprendre conscience des choix qui les fondent, de mieux comprendre leurs portées réelles et qu'ils doivent redevenir les objets politiques qu'ils sont en réalité, objets politiques qui doivent être aussi accessibles au débat démocratique. Il faut donc retrouver une capacité à déchiffrer les chiffres, en ne se laissant pas intimider par l'autorité que leur confère leur apparente naturalité ou les pouvoirs qui les promeuvent. -
La justice au travail : quelques leçons de l'histoire
Alain Supiot
- Seuil
- Libelle
- 18 Mars 2022
- 9782021509311
De Solon aux gilets jaunes, l'expérience maintes fois répétée dans l'histoire nous enseigne que l'injustice, lorsqu'elle dépasse certaines bornes, engendre inévitablement la violence et menace la paix, aussi bien entre les nations qu'en leur sein. La justice sociale n'est pas un supplément d'âme pour des idéalistes au bon coeur, mais un gage de stabilité pour des politiques réalistes. L'histoire peut-elle aussi nous apprendre ce qu'est la justice ? Ou bien ne nous laisse-t-elle voir que les funestes effets de son absence ?
-
Cinq têtes coupées, Massacres coloniaux : enquête sur la fabrication de l'oubli
Daniel Schneidermann
- Seuil
- 6 Octobre 2023
- 9782021529944
Un jour de 2022, Daniel Schneidermann découvre, au musée de l'Armée, une photo d'atrocité coloniale, publiée dans L'Illustration : cinq têtes « indigènes » coupées. Cette image qui date de la conquête en 1891 du Mali et du Niger, alors dénommés le « Soudan français », marque un tournant : pour la première fois, grâce aux progrès de la photo, l'opinion peut visualiser la violence de la conquête. Auparavant, il n'était question que de faits glorieux, et de la mission civilisatrice de la France.
Période de construction de la Tour Eiffel, la « Belle Époque » fut aussi une étape décisive dans les conquêtes coloniales et leur cortège de massacres, à l'abri des regards du gouvernement et de la presse. Nombre de militaires et d'officiers y perdirent la raison, jusqu'au crime contre l'humanité.
Ce livre est une enquête sur la fabrique du déni à grande échelle, de cette époque à nos jours. Partant de cette image, l'auteur plonge dans la propagande coloniale de l'époque, en s'interrogeant sur sa propre ignorance, et sur la persistance actuelle d'une certaine indifférence blanche.
Cinq têtes coupées brosse la fresque d'une période refoulée, et le portrait de ces « héros » de la colonisation dont la popularité est aujourd'hui difficilement imaginable. Il analyse comment se construit l'occultation d'un événement historique. À l'heure où les ex-colonies s'émancipent vigoureusement de la Françafrique, n'est-il pas enfin temps de regarder ensemble cette histoire en face ?
Daniel Schneidermann est journaliste et créateur de l'émission « Arrêt sur images ». Spécialiste des récits médiatiques, il est notamment l'auteur de Berlin, 1933. La presse internationale face à Hitler (Seuil, 2018), qui a obtenu le prix des Assises du journalisme de 2019. -
En France, le quinquennat d'Emmanuel Macron aura suffi à installer Netflix dans nos habitudes de consommateurs, au même titre qu'Amazon, Uber ou Deliveroo. Entre le patron de la plateforme et celui de l'Élysée, un même profil se dessine : ce sont deux ultralibéraux, qui n'aiment rien tant que l'innovation. Netflix est ainsi devenu le fournisseur officiel d'images de la start-up nation, le média de nos vies immatérielles et domestiquées. Nous avions une longue histoire avec le cinéma, un goût commun pour la salle, mais ils ne pèsent plus rien face à la puissance de l'économie numérique.
-
S'unir pour mieux se nourrir
Violette Queuniet, Le Cil vert
- Actes Sud
- Je Passe A L'acte
- 8 Février 2023
- 9782330172572
Partout, de nouvelles façons de fabriquer et de distribuer les aliments du quotidien fleurissent. Plus durables, ces commerces à contre-courant des grandes surfaces favorisent les producteurs et les consommateurs en minimisant les intermédiaires et leurs profits. Pour en finir avec les produits hyper transformés, hyper emballés, hyper trimballés qui vident les territoires de leurs commerces de proximité tout en favorisant la surexploitation et l'artificialisation des sols, ce guide nous donne les clés pour privilégier les circuits courts, voire monter une structure collaborative d'approvisionnement.
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Au risque d'une crise de confiance sans précédent des citoyens dans l'État dont ils interrogent désormais la légitimité « publique », c'est-à-dire la capacité, voire la volonté, de se faire le relai des intérêts collectifs, et de protéger les citoyens. L'état général d'impréparation dans lequel s'est trouvé l'État au commencement de la pandémie aura servi ici de révélateur ; jetant une lumière crue sur l'action des gouvernements précédents qui avaient suivi une politique de réduction des coûts et d'efficacité gestionnaire au risque de priver les services hospitaliers des masques et des lits d'hôpital nécessaires. Dès lors que le gouvernement ne paraît plus agir en « pouvoir public », plus rien ne semble justifier l'exception étatique qui confère à cette organisation politique un statut dérogatoire et des pouvoirs exorbitants. C'est du reste cette tension qu'a révélé le mouvement des Gilets jaunes, marqué tout à la fois par des attentes fortes à l'égard de l'État des services publics (en termes de qualité et d'égalité d'accès aux hôpitaux, aux transports publics, etc.), et une défiance inédite à l'égard de gouvernants tenus pour responsables de l'échec de l'État à tenir ses promesses « publiques ». Cette crise de confiance ne pouvait pas tomber plus mal alors que nous avons collectivement besoin d'un État et d'une Union européenne capables de conduire, au nom de tous, la conversion écologique de nos sociétés et de nos économies, et alors que nous devons faire face aux conséquences sanitaires, mais aussi économiques et sociales profondes de la pandémie Covid. Manière de dire, en somme, que la réflexion sur le « public » et les liens qu'il entretient avec l'État forme aujourd'hui un préalable à toutes nos discussions sur le changement d'orientations des politiques publiques. Les nouvelles théories démocratiques l'oublient parfois, toutes occupées qu'elles sont à faire apparaître de nouveaux horizons mobilisateurs - qu'il s'agisse de la transition écologique ou des nouvelles formes de démocratie participative. Mais, sans réfléchir à ce que l'État est devenu au fil des trois dernières décennies, ni aux chaînes de dépendance dans lesquelles il inscrit aujourd'hui son action, elles s'exposent au décalage en faisant comme si l'État était ce simple « levier » disponible et mobilisable pourvu qu'on veuille bien lui donner le sens politique voulu. Or il y a précisément lieu d'en douter. C'est pourquoi il faut reprendre le fil du « public » et remettre sur le métier une notion qu'on avait paresseusement abandonnée comme une vieille relique. Il faut faire l'inventaire des glissements de terrain qui se sont produits depuis trente ans et ont fragilisé les soubassements publics de l'État, décrire leurs effets politiques et démocratiques, et explorer les voies possibles d'un nouvel esprit public du gouvernement.
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Notre monde est logistique. La pléthore d'acteurs qui consacrent leur énergie à acheminer les biens consommés de par le globe en témoigne : la circulation des marchandises est devenue un moteur essentiel du capitalisme mondialisé. Les pays les plus riches se constellent d'entrepôts qui prennent la place des usines abandonnées ; les pays les plus pauvres, eux, assurent la fabrication et le traitement des biens qui sillonnent la planète pour être achetés, consommés, mis au rebut.
Si c'est le monde industriel et marchand qui a donné à la rationalité logistique sa forme la plus aboutie, celle-ci s'étend aujourd'hui à l'ensemble de nos activités. Des politiques migratoires aux pratiques culturelles, de la conservation de l'environnement aux relations humaines, il n'existe plus guère de domaines de la vie qui ne soient soumis à la gestion des flux, ce principe fondamental d'intendance.
Il est grand temps de se demander comment le royaume logistique régit nos existences ; de montrer combien les conséquences de ses manquements sont dramatiques pour le vivant ; de raconter les multiples luttes qui lui font face. Et surtout, comme s'y emploie ce livre, il est urgent d'inventer d'autres imaginaires de la circulation et du transport, d'autres sujets collectifs pour un monde dans lequel les circulations ne seraient pas un instrument mortifère au service de la valeur marchande. -
Qui est journaliste ? Qu'est-ce que le journalisme ? Ces questions traversent la société française qui s'interroge sur la légitimité des médias à bien rendre compte de la réalité du monde. Répondre à cette interrogation, c'est aussi s'intéresser au système de financement de la presse et aux lois qui menacent l'exercice de sa liberté.
Quatrième pouvoir, voix de son maître ou contestataire, support de publicité ou de propagande, la presse (ou les médias ) est, au même titre que le monde politique, soumise à la musique sournoise des soupçons, des critiques désordonnées. À tel point que les journalistes enquêtent sur les pratiques de leurs confrères. Ce qui en démocratie n'est pas pour rassurer le lecteur dans la mesure où, par ailleurs, il doute du politique. Cela induit aussi le risque d'un désintérêt pour l'information dûment produite.
Dès lors, dans une profession qui est peu ou pas réglementée, il s'avère de plus en plus difficile pour les lecteurs d'identifier le vrai journalisme du faux, alors qu'ils subissent des torrents de messages numériques livrés sur menu déroulant. Être journaliste, est-ce un statut ? Une position ? Un métier ? Une carrière ? Un laissez-passer ? Juste le résultat d'une technique de formation professionnelle ? Ou la mise en commun de compétences et savoirs personnels exogènes à cette profession et ponctuellement mises au service de la pluralité de l'information ?
Le journalisme concerne chacun. Il relèverait plutôt à l'évidence de la capacité d'un individu à se montrer imperméable à un certain nombre de pressions, d'hésitations, ou à se sentir libre d'approcher autant que se peut une vérité ou une opinion sans crainte. -
Si le XVIIIe siècle a été pour Kant « le siècle de la critique à laquelle il faut que tout se soumette », le temps où nous vivons signe le triomphe de la confusion à laquelle rien n'échappe. Mais la critique ne se limite pas à un exercice intellectuel et mental, la marque de ce qu'on appelle l'« esprit critique ». Elle est une attitude et même un geste, une manière de dire, de penser et d'agir et surtout une exigence politique. C'est l'une des conditions du vivre-en-commun et sa force aujourd'hui nous manque.
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L'Art roman : Un défi européen
Alain Erlande-Brandenburg
- Gallimard
- Decouvertes Gallimard
- 28 Avril 2005
- 9782070300686
L'Europe de l'an mille est marquée par un formidable renouveau économique, politique et religieux, mais reste fidèle aux traditions carolingienne et antique dans les domaines intellectuel et artistique. C'est entre 1060 et 1200 que cette transformation de la société va entraîner une renaissance de l'activité créatrice et architecturale. Les maîtres d'ouvrage laïcs et religieux conçoivent des programmes inédits et prennent toute la mesure du rôle pédagogique de l'image qui envahit alors tout l'édifice, le mobilier et les objets de culte... et s'inscrit triomphalement au portail. Pour mettre sur pied cette politique destinée à l'ensemble de l'Europe, l'appel à de grands artistes créateurs de formes est une nécessité. Totalement maîtres de leurs techniques, ceux-ci vont y apporter sensibilité et créativité, traduisant le programme des maîtres d'ouvrage avec une diversité exceptionnelle. De Rome à Vézelay, de Spire à Dubrovnik, de Durham à Compostelle, Alain Erlande-Brandenburg présente et analyse le défi de l'Europe romane, symbiose étroite entre les commanditaires et les créateurs.
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Algocratie : vivre libre à l'heure des algorithmes
Arthur Grimonpont
- Actes Sud
- Domaine Du Possible
- 12 Octobre 2022
- 9782330168674
Jamais l'humanité n'avait atteint un tel niveau d'interconnexion. Jamais nous n'avions eu à notre disposition autant de temps libre. Ces conditions réunies auraient pu nous permettre d'atteindre un sommet dans notre capacité à nous informer, à communiquer, à nous éduquer, à coopérer, et à résoudre toutes sortes de défis collectifs. Mais nous avons délégué à des plateformes privées la charge d'organiser la vie sociale, politique et culturelle de quatre milliards d'êtres humains. Quand la plus grande place publique de l'humanité se trouve privatisée, bâtir une démocratie de l'information devient une nécessité vitale.
Ce livre en esquisse le rôle dans la construction d'une intelligence collective. Résister à la puissance et à l'autonomie des algorithmes afin de maintenir l'humain au coeur de nos sociétés, de nos pratiques. Et pouvoir les utiliser à bon escient. -
Péril climatique, extinction des espèces, pollutions... N'en jetez plus ! Démoralisée par la litanie des mauvaises nouvelles, la journaliste Dorothée Moisan a décidé de réagir. Refusant de céder à l'éco-anxiété, elle est partie en quête de personnalités qui, bien qu'aux premières loges du désastre, trouvent des raisons de vivre, de lutter, et d'être heureux.
Car effondrement ou pas, on peut garder la pêche ! C'est ce que révèlent ces portraits d'écologistes inspirants : non seulement ils ne se laissent pas abattre, mais rebondissent par l'action, la créativité, le rire, la transmission ou l'engagement. Pleinement conscients de la catastrophe écologique, l'humoriste Guillaume Meurice, le jardinier Gilles Clément, la maire Léonore Moncond'Huy, la glaciologue Heïdi Sevestre, l'ingénieur Corentin de Chatelperron, l'écologue Franck Courchamp, la facilitatrice de transition Anne de Béthencourt, l'étudiante Louise Arrivé ou le père de famille Guillermo Fernandez arrivent encore à s'amuser. Ils ont trouvé l'astuce philosophale pour se battre en gardant le sourire et nous livrent leurs réjouissantes recettes de survie. Afin que nous devenions, nous aussi, des écoptimistes ! -
L'histoire est une des plus anciennes activités humaines. Et pourtant, elle est tout sauf immobile : ses formes et son rôle n'ont cessé d'évoluer. Ce qui définit notre temps, c'est que l'histoire est partout : elle s'est démocratisée, investissant tous les domaines de la culture collective. Devant le sentiment d'accélération, de déclin ou de fin du monde, le passé a par ailleurs pris un poids inédit dans nos sociétés. Divertissement, outil de connaissance, l'histoire est devenue un formidable enjeu de pouvoir, faisant l'objet d'instrumentalisations intensives. Or dans le même temps, des conceptions conservatrices de l'histoire tentent de s'imposer : « fin de l'histoire », « roman » ou « récit » national, « crise », « réforme », « fake news » ou « postvérité », autant de mots qui nourrissent de nouvelles formes de confiscation de l'histoire commune. Face à ces discours, il serait contre-productif de réserver l'histoire à l'histoire savante des historiens, ou de prétendre qu'elle devrait se désintéresser du présent. Si toute histoire ne se vaut pas, si l'histoire ne peut pas tout, il ne faut pas céder à l'impression que nous serions impuissants devant elle : il est temps d'en rouvrir les portes et de la ressaisir comme un outil de connaissance et d'émancipation collective, comme une activité critique et partagée de la vie sociale. Dire cela, ce n'est ni l'affaiblir ni exagérer sa puissance, c'est au contraire, et à la condition expresse de respecter quelques règles, lutter contre toutes les formes de dépossession.